Sejours à l'hopital

La fragilité croissante de mon père faisait qu'il rentrait souvent en urgence à l'hôpital. Un petit rhume avait sur lui des conséquences catastrophiques et il n'arrivait plus à vider ses poumons qui s'infectaient pour un rien. Je me rappelle qu'à cette époque j'avais 41 ans et je passais un BTS en alternance payé par mon employeur. J'allais donc en cours le matin à 8 heures, je rentrais à midi pour récupérer ma mère et je la déposais à l'hôpital. Nous habitions à 25 Km de Grenoble, il lui était difficile de prendre le bus. Le soir, en sortant des cours que je suivais à la CCI de Grenoble,  je passais voir mon père et récupérais ma mère au passage. Ce fut une période difficile car je n'avais pas vraiment la tête aux cours.

Un jour ma mère m'annonce que mon père a une péritonite aiguë et qu'il faut l'opérer d'urgence. Le chirurgien a appelé personnellement maman en lui disant qu'il l'opérerait très tôt le matin. En allant à mes cours je récupérais ma mère au passage. Je ne pouvais pas rester à l'hôpital car j'avais un BTS blanc et je ne pouvais pas rater l'épreuve. Je déposais ma mère et lui dit que j'appellerais vers 10 h au moment de la pause. J'étais très inquiète et je n'attendais qu'une chose c'est que l'épreuve soit terminée pour pouvoir m'absenter. A 10 heures je téléphone donc et c'est mon père qui me répond...agréablement surprise je m'étonne quand même et lui demande s'il a été opéré... Il me répond "oui" et me dit que tout s'est bien passé et qu'il va très bien. Je vais de surprise en surprise car je ne m'attendais vraiment pas à ce qu'il soit aussi robuste. Il me demande même si mon épreuve s'est bien passée ... J'étais rassurée et heureuse.

Lorsqu'il sortit de l'hôpital pour la nième fois en Avril 1999, nous décidâmes ma mère et moi de l'emmener dans son pays d'enfance, Port Leucate, où il adorait pêcher. Le médecin nous dit que ce n'était pas très prudent mais tant pis, le plaisir de mon père passait avant toute chose et nous ne savions pas combien de temps nous le garderions encore presque valide.

Nous partîmes donc pour nos 4 jours d'aventure vers Port Leucate. Nous n'avions pas réservé car nous étions en avril et ce n'est pas la haute saison. La météo prévoyait du beau temps et cela nous encouragea encore plus. Après quelques heures de voiture et quelques arrêts repos pour mon père nous arrivâmes sur place. Il fallait trouver un hôtel. Mes filles étaient avec nous. Nous étions donc 5 à loger dans deux chambres. Le premier hôtel au bord de la plage avait des escaliers qui nous semblaient impraticables pour mon père. En passant sur la route j'avais repéré l'hôtel du surf qui me paraissait pas mal même s'il était loin de la plage. Nous arrivâmes et l'hôtel était mieux que nous ne l'avions imaginé. De petits bâtiments entouraient une piscine et chance inespérée il restait une chambre donnant sur la piscine en plein pied. Une autre chambre était au premier et nous réservâmes les deux.

Ce fut quatre jours merveilleux pour mon père et nous. Un jour nous allâmes sur le port avec tout son barda de pêche. Nous l'installâmes confortablement dans son fauteuil. Il commença à apprêter sa ligne lorsqu'il nous dit que les hameçons n'étaient pas les bons et qu'il fallait une autre grosseur. Ma mère et moi courûmes jusqu'au magasin le plus proche pour lui acheter ses hameçons et mon père fut heureux de pouvoir retrouver le plaisir de la pêche le temps d'un après midi.

Je n'oublierais jamais ces journées et je ne regrette pas d'avoir désobéi au médecin car même si ce n'était pas prudent, cela valait bien ces lueurs de bonheur dans les yeux de mon père.